Médias indépendants : l'inégal parcours du combattant
Lancer un média indépendant est un véritable parcours du combattant, surtout quand on n'est pas connu ou que l'on n'a pas un carnet d'adresses bien étoffé au départ.
Marc Rafanell López en CC v/ Unsplash
Par Cyrille Frank, François Defossez, Laura Pironnet, Samy Snider, Orlane Tonani.
Bonjour à toutes et à tous
Cette semaine on revient sur une tribune parue sur LinkedIn sur laquelle on rebondit, à propos de la difficulté de lancer son média. Et de la double inégalité qui frappe ceux qui n’ont ni capital, ni notoriété.
Bienvenue à nos derniers lecteurs et lectrices de L’Alsace, Rossel, Slate, Philomag, Arte, Tequila, Effy… et merci à toutes et à tous de votre fidélité !
Bonne lecture :)
[L’équipe Médiarama]
🔎 Médias indépendants : le parcours (inégal) du combattant
[Par Cyrille Frank, directeur de la formation/transformation numérique]
Non seulement il y a une inégalité entre médias indépendants et médias traditionnels, mais cette inégalité se prolonge entre médias indépendants.
📍 D’abord il y a la question de l’accès au capital : le choix de l’indépendance entrave fortement l’accès au capital privé. Soit il refroidit les investisseurs, soit l’organisation de la structure en coopérative ou association, limite ou empêche l’entrée au capital de gros actionnaires. Gros handicap de départ vis-à-vis de nouveaux médias financés par de grands groupes médias ou des milliardaires (ex : Franc-Tireur).
📍Ensuite, cette inégalité se poursuit dans l’accès au capital public : les aides à la presse favorisent en réalité les grands groupes de médias.Les aides directes sont une forme de soutien à l’emploi : en volume, elles aident surtout les quotidiens des grandes rédactions. Ce qui peut sembler étrange quand L’Opinion ou Le Parisien/Les Echos, grands bénéficiaires, sont soutenus par de grands groupes de luxe (Arnault/Bettencourt pour le premier, LVMH pour le second)
Montant des aides directes à la presse en 2022 - ministère de la culture
Et cette inégalité affecte la sphère indépendante elle-même.
Tous les médias indés ne partent pas avec les mêmes chances. Certains, plus que d’autres ont :
Le réseau. Si vous avez été à la tête de la rédaction d'un grand média, ça aide (ex. Edwy Plenel).
Les autres directeurs et directrices de presse décrochent le téléphone pour vous, vous donne conseils et noms. Vous vous êtes entourés de gens pour identifier rapidement les priorités, les compétences nécessaires, les bons profils pour faire de la vidéo, du marketing, etc. Vous cherchez à être diffusé en librairies, ce qui est réputé pour être très compliqué ? Les éditeurs ouvrent les portes pour vous.”
La notoriété. Le financement participatif aide surtout ceux qui sont déjà célèbres (les fondateurs de Blast, par exemple), ou ceux qui…
s’appuient sur un réseau qui a permis de trouver de puissants leviers de communication (La Déferlante).
Les moyens initiaux. liquidités, effectifs… qui dépend là aussi de votre capacité à lever des fonds. Plus facile si vous avez le carnet d’adresses et la notoriété avec vous.
Et Philippe de conclure, que la principale aide au lancement d’un média reste l’allocation chômage,
sans laquelle reste très difficile de monter un média (…) Et en réalité : on voit mal comment on pourrait se verser un salaire avant un an.
Un témoignage qui ne se veut pas défaitiste, car “monter un média indépendant n’est pas impossible”. Mais la profusion des petits médias, souvent consécutive aux différents plans sociaux de ces dernières années s’accompagne aussi d’une précarité forte et d’une pérennité compliquée.
Cyrille Frank
Formateur, consultant pour les médias, fondateur de mediaculture.fr, directeur de la formation et de la transformation numérique chez @CosaVostra